L'administration de l'intérêt commun du groupe familial : l'exemple de la démocratie athénienne.

Cette page répond à l'interrogation suivante : comment s'organiser pour gérer un intérêt commun ? Pour répondre à cette question nous pouvons nous demander s'il existe dans l'histoire de l'humanité un exemple d'organisation. La réponse existe. Il s'agit de la démocratie athénienne.

La démocratie athénienne, un exemple d'organisation familiale.



1 Temps premier et niveau premier, le socle familiale de la démocratie (30 août 2011).


A l'origine, tout est affaire de familles entre les familles de la côte, entre celles de la montagne, et celles de la plaine. Des liens se tissent, une culture commune faite de valeurs communes et de foi unique se tisse. Les termes utilisés sont significatifs. Les familles se regroupent en phylai (tribus) -philos=amitiés. A leurs têtes sont nommées des phylobasileus. Les phylai étaient divisés en trois sous phylai appelés les trytties (tiers de tribus). Cette organisation devait avoir un sens dans le traitement des affaires communes puisqu'on la retrouvera à l'époque de Clisthène pour la représentation équitable des familles dans la gestion et l'administration de l'intérêt général. On retrouve également cet aspect familial avec l'autre mode de regroupement par phatriai (fatrie).

J'imagine aisément qu'il y a les affaires de ma famille celles qui me permettent de subvenir à mes besoins.

Puis après les affaires de ma famille, il y a les affaires qui me concernent avec les familles voisines : "...la première communauté formée de plusieurs familles pour des besoins qui débordent la vie quotidienne est le village".

Puis, il y a les affaires qui nous concernent tous "...la communauté née de plusieurs villages est la cité."


POLITIQUE, LIVRE I : "...toute polis est une sorte de communauté (koinonia) et que toute communauté est constituée en vue d'un certain bien...il est évident que toutes visent un certain bien et que précisément le bien souverain entre tous est la fin de la communauté qui est souveraine entre toutes et inclut toutes les autres : c'est elle qu'on nomme la polis ou communauté politique."

ou encore la traduction du Citoyen Champagne de 1797



Pour comprendre comment s'articule les préoccupations des athéniens, la boucle entrepreneuriale constitue une bonne grille de compréhension. Les familles athéniennes sont en affaire pour subvenir à leur existence et être autonomes. Elles suivent la logique de la boucle : famille ---> affaire --->patrimoine. Aristote regroupe les questions qui concernent la boucle sous le nom d'économie de oikos, le foyer (oikos-nomia).

"...la propriété est une partie intégrante de la famille et l'art d'acquérir la propriété (chrématistique), une partie de l'administration domestique (sans les ressources indispensables il est impossible et de vivre et de vivre bien) ; ...chaque branche d'activité déterminée doit avoir ses instruments appropriés..."

Je rejoins ici la lecture de Victor DAVIS HANSON qui voit dans les grecs fondateurs de la démocratie des agriculteurs et des fermiers autonomes et solidaires les uns avec les autres.(Other Greeks : Family Farm and the Agrarian Roots of Western Civilisation)

Ces trois pôles sont défendus, promus par la politia (je conserve le terme sous sa forme grecque car il concerne pour moi les familles), et cela dans la vertu : les hommes, les affaires, leurs patrimoines.

La communauté protègera le capital humain : interdiction de condamner sans juger, interdiction d'utiliser la torture, mais aussi formation (paideia), valorisation de la parole (iségoria),...avoir un nom, une histoire familiale,....respect des aïeuls, des ancêtres,..."Homère reproche de n'avoir "ni clan, ni loi, ni foyer".
La communauté protègera le capital patrimonial : les archontes juraient à leurs prises en charge de respecter que chaque athénien restera possesseur et maître de ses biens, aucune revendication économique...respect du patrimoine transmis,...
La communauté protègera et favorisera les affaires : création de colonies, l'empire commercial,...
La communauté protègera le culte : procès des métèques n'ayant pas respectés les mystères d'Euleusis, organisation en Assemblée des fêtes religieuses...

Et pour réaliser cette boucle vertueuse d'autonomie, il est nécessaire d'avoir un comportement exemplaire :"Il est donc clair que pour le gouvernement domestique les hommes importent plus que la possession des choses inanimées, l'excellence morale des êtres humains plus que l'excellence des biens possédés que nous appelons la richesse,..."

L'intérêt général (la fin de la communauté selon Aristote) de qui ? C'est l'intérêt général non pas des habitants de l'Attique mais l'intérêt général des individus issus des familles d'athéniens. Il faudra nécessairement définir tôt ou tard les frontières de cet intérêt général.


C'est Périclès qui figera la loi de communauté. Elle sera devenue très exclusive : l'intérêt général se limite aux intérêts des athéniens nés de parents athéniens (auparavant il suffisait que le père soit athénien, oi métroxénoi). Cela veut dire principalement que les valeurs, les us et les coutumes sont le ciment de la communauté, de la Polis. En d'autres termes, il faut avoir été bercé par L'Iliade et L'Odyssee pour faire partie de la communauté. C'est avec cette loi que la communauté athénienne devient une communauté familiale.

Puis, l'intérêt général s'étendra progressivement aux athéniens qui prennent part à la défense de la communauté (cela paraît évident). On a ainsi vu une progression des athéniens concernés : de l'élite à la masse. Elle démarre avec les aristocrates (les hippeis, les cavaliers), puis les ploutocrates (les zeugites qui peuvent financer l'équipement hoplitique) puis toute la population mâle avec l'apparition de la flotte armée composée de la masse des athéniens, les thètes..

Ce socle familiale sera déjà figé administrativement sous Clisthène, par le concept de dème. Le dème identifie les regroupements d'intérêts communs des familles de la côte, de la plaine et de la montagne. Clisthène en fera ressortir 139. Dans ces dèmes sont traités les intérêts communs lors d'assemblées. Leurs représentants élus se nomment des démarchos (ou démarques). Il me plaît à penser que démocratie vient de la notion de dème : il s'agit d'une représentation des dèmes au niveau de l'intérêt général orchestré par une politia.

La démocratie n'est pas des individus autonomes et sans liens décidant en assemblée d'intérêt général de leur intérêt propre. La démocratie c'est des intérêts communs représentés par des individus membres de dèmes, de phylai, qui décident en assemblée. Un athénien ne se nomme pas seulement par son nom, mais aussi par celui de son ascendant (patronymikon) et celui de son dème (dèmotikon) : Sôkrates Sôphroniskou Alopékèthén, Socrates fils de Sôphroniskos du dème d'Alôpékè.

Retenons pour les familles en affaires :
1/ La nécessité de délimiter la frontière : qui est concerné ?
2/ La nécessité de découvrir les valeurs de la communauté,
3/ Les décisions sont prises de manière collégiale : assemblée, comités,...
4/ L'autonomie des êtres égaux par le respect du bon fonctionnement de la boucle entrepreneuriale


2 Les organes nécessaires à la Polis, nécessaires pour toute organisation entre égaux.


Quatre organes apparaissent :
  • L'Assemblée où tous les membres sont convoqués. Ils sont  au minimum informés, au mieux ils décident.
  • Le Conseil, l'auxiliaire de l'Assemblée, il exécute, au mieux sans prendre de décisions et s'appuie sur des comités spécifiques (guerre, trésoreries,...)
  • Le Dikastirion, il indique ce qui est droit quand un arbitrage est sollicité. Il contrôle les membres du Conseil.
  • Enfin, les nomothètes, ils sont les gardiens des lois. Ils les rédigent, les rendent public et sont sollicités en matière de nouvelles lois. Les lois peuvent venir de l'Assemblée ou encore du Dikastirion.


 L'Assemblée Décide
 Le Conseil
 Exécute
 Le Dikastirion (Tribunal)
 Contrôle
 Les nomothètes
 Publient et assurent la cohérence des lois


3 Pour aller plus loin sur la démocratie familiale athénienne.

On pourra étudier consciencieusement la démocratie athénienne en tant qu'une constitution des familles athéniennes :
  • Mogens H.HANSEN La Démocratie Athénienne. A l'époque de Démosthène. Structure, principes et idéologie. Collection TEXTO. Editions TAILLANDIER. Juillet 2009
  • Donald KAGAN Périclès. La naissance de la démocratie. Collection TEXTO. Edition TAILLANDIER. 2008 et 2011.
Pour  aller plus loin  :


4 Une fois les institutions mis en place, se pose la question de la vertu de Justice :





"...Si tu pars aujourd'hui pour l'autre monde, tu partiras condamné injustement, non par nous, les lois, mais par les hommes." Criton/53e-54d

d'où notamment chez Platon, La République.


Sélection de texte de Philosophie Politique sur  par Famillesenaffaires.fr